En traitant la dimension architecturale des paysages qui s’offre à lui, Yann Couëdel met en exergue l’impact des êtres vivants (animal ou humain) sur notre environnement : les deux espèces le façonne, mais la seconde d'une manière beaucoup plus invasive et irréversible. Dorénavant, un site de stockage de conteneurs devient sujet à représentation au même titre que la luxuriance d’une forêt. Et puis il y a cette rencontre fortuite, incongrue des espèces.
Si l’Homme empiète allègrement sur des territoires sauvages, il est plus rare que l’animal s’aventure sur nos terrains urbanisés. Et pourtant, c’est exactement l’impact qu’a eu l’usage du confinement des populations : cerfs et sangliers se sont réappropriés des territoires en déambulant dans des villes mortes, quand un dauphin béluga a remonté la Seine.
La série « Wild » prolonge et extrapole ce phénomène, mettant en tension nature sauvage et nature industrialisée. Derrière le constat de l’anthropisation, se cache la question de l’urgence climatique, un sujet qui jalonne l’œuvre du photographe.
En-dehors de ces problématiques sous-jacentes, Yann Couëdel s’intéresse également au paysage architecturé du point de vue de sa construction formelle et esthétique. Il y décèle un potentiel narratif, appuyé par un travail de la lumière et du cadrage pour créer des scènes dignes de décors de cinéma. Il fait ainsi pénétrer le réel du côté de la fiction.
Le spectateur est tantôt happé par ce qui devient un vaisseau spatial pris dans le panache d’un ciel chargé (une église contemporaine dans un ciel d'orage), tantôt interloqué par cette route qui fend littéralement de la lave (panorama islandais).
Dans ces deux approches du paysage, le traitement de l’image répond à un même processus créatif qui a vocation à troubler celui qui le contemple au travers d’une expérience sensorielle quasi-immersive. Plus qu’une photo, le plasticien produit ce que l’on pourrait qualifier d’ « hyper-photo » en référence à la réalité augmentée, mais dans une forme tangible et non virtuelle. L’image imprimée subit un découpage raisonné des éléments qui la composent. Certains d’entre eux sont encollés sur des supports à épaisseurs variables ; d’autres sont remplacés par de véritables objets (tuyau, miroir, épingle), matériaux (Plexiglas) ou matières (pierre de lave). De la reconstitution découle une image composite en bas-relief, jouant du trompe l’œil et de l’illusion, brouillant la frontière entre réalité palpable et représentation, et accentuant l’ambivalence réalité ou fiction. Le plasticien déstabilise le spectateur qui, naturellement, passe d’un état contemplatif à une mise en mouvement pour comprendre d’où provient cet effet 3D. C’est par son déplacement vers un autre point de vue que l’hyper-photo s’anime et dévoile sa construction.
À l'ère du « tout digital », Yann Couëdel parvient à combiner une production en photographie numérique à un savoir-faire artisanal par un minutieux travail de découpe et d'ébénisterie. En résulte un effet spectaculaire dont la poésie et le réalisme interpellent directement nos sens.
Expositions :
2023 / 07.10 - 28.10 - De la peinture à la photographie - Y&Y Couëdel
La Serrurerie - Enghien-les-Bains - France
2023 / 01.09 - 31.12 - Wild
Business Parc - Reinach - Switzerland
2022 / 17.09 - 16.10 - Make Life Magic
Gallerie Lorien - Frederiksberg - Denmark
2021/ 30.10 - French Copen'Art
Frelsens Hær - Frederiksberg - Denmark
2021/ 01.6 - 30.9 - Copenhamburg
Hotel SP34 - Copenhagen - Denmark